La
loi n°73/5 du 7 décembre 1973 légèrement modifiée par la loi du 8 juillet 1976
fixant le régime des fêtes légales en république unie du Cameroun, liste 4
fêtes civiles et 6 fêtes religieuses dont 4 pour les seuls chrétiens, mais là
n’est pas le sujet. Ainsi parmi les 4 fêtes civiles figure au 1er
mai, la fête du travail. Ce qui est curieux c’est qu’à cette date, dans
plusieurs pays dans le monde, on parle
effet de travail. Mais pas en termes de fête. La France qui a séculairement
inspiré notre législation célèbre aussi la fête internationale du travail. Ce
qui évidemment ne renvoie pas à la même chose. D’ailleurs les Etats Unis
d’Amérique berceaux de cet événement, le
célèbrent plutôt le 1er lundi
du mois de septembre, c’est
la Labor
day, qui par ailleurs, n’est pas férié. Certainement ils ont choisi de
rester pudique en réminiscence de nombreux de leurs compatriotes qui perdirent
la vie dans le combat pour l’amélioration des conditions de travail. Comme on
dit tant qu’on a pas payé le prix d’une chose, on s’amuse avec !
Car
en effet, tout est parti comme vous devez le savoir, d’une grève ouvrière
syndicale le 1er mai 1884 pour la réduction du temps de travail
quotidien de 10H à 8H. 1er mai car cette date coïncidait avec
l’entame de l’année comptable pour les entreprises. Deux ans plus tard, le 1er
mai 1886, la grève persistante fût transformée en un bain de sang par une
police zélée en furie. Mais la cause fût finalement gagnée. D’autant plus que 2
ans plus tard en 1889, le
congrès de l’Internationale Socialiste réuni à Paris décida de consacrer chaque
année la date du 1er mai comme journée de lutte à travers le monde. C’est Le régime de Vichy c’est-à-dire, le régime politique français dirigé par le maréchal Philippe
Pétain, qui assure le gouvernement de la France au cours de la Seconde Guerre mondiale, du 10 juillet 1940 au 20 août 1944 durant l’occupation du pays par les forces armées du Troisième
Reich3, et dont le siège se situe à Vichy, c’est donc le régime de vichy
disais-je, qui transformera
cette journée en «fête du travail». Rien d’étonnant donc que le cameroun ait
hérité de cela dans le package colonial. Sauf qu’en France même, depuis 1947, le 1er mai,
jour de la fête du Travail se caractérise certes par une interdiction légale de
travail sans réduction de salaire. Mais c’est surtout consacré aux défilés des syndicats dans les
grandes villes, et, il faut bien le noter, c'est aussi le jour de la fête du
muguet, dont il est d'usage d'offrir un brin en guise de porte-bonheur.
Le muguet c’est une fleur. Vous me direz que c’est toujours la fête. De toute
façon chez nous le temps n’est pas aux grandes revendications. On oublie que le
chômage est criard, que la sécurité sociale du travailleur n’est qu’un slogan,
que les salaires sont étrangement bas, que le smic est ridicule et peu
respecté, que le contentieux du travail est des plus iniques, que les droits
des travailleurs sont des plus bafoués, que les discriminations de genre,
d’ethnies et de handicap existent, que les disparités de départ à la retraite
sont frappantes. Que dire de tous ces métiers non conventionnés de vendeurs de
soya, de coiffeurs, de moto-taximens qui échappent à toute régulation et au
sein desquels se développe parfois un esclavagisme déguisé ?
Le
plus important c’est de fêter. D’ailleurs s’il y en a bien qui travaillent en
cette période, ce sont les sérigraphes et les tailleurs. C’est à se demander
comment des travailleurs exerçant en si mauvaise condition peuvent trouver le
moyen de se faire aussi beau au jour où il faut le plus dénoncer ces conditions
de travail ? C’est la journée camerounaise de l’amnésie collective. Le comble est le défilé avec des tenues
aux couleurs des entreprises employeuses. Car en plus de les détourner de leur
droit de poser des problèmes, les travailleurs en ce jour de beuverie, sont
utilisés pour une publicité enthousiaste grandeur nature de leurs bourreaux. Le
Gouvernement l’a si bien compris, que dis-je ? orchestré, que le Ministre
du Travail et de la sécurité sociale, Grégoire OWONA, s’est offert à l’occasion
une petite villégiature dans le littoral. Le 24 avril il est allé lancer
fastueusement la semaine du travailleur à Njombé-penja dans la Mungo. Visite
ponctuée par une grande marche au bout de laquelle le ministre déclarera : « Nous avons marché parce
que les travailleurs ont marché pour obtenir cette fête internationale » Plus moqueur que ça, tu meurs… Et le
drame c’est que les moqués ne s’n sont visiblement pas rendu compte, ou alors
ils étaient trop épris du thème de cette 129ème fête « Construire l’avenir du Cameroun dans
la paix, la solidarité et le travail décent » ils n’auront retenu que la
paix… A en croire Grégoire Owona, tentant de donner du sens à sa ballade
campagnarde, le Cameroun a
décidé de rendre hommage
au travail de la terre et à l’agro-industrie cette année. Et
toc ! Les gros mots !
Le dernier gadget, antidote à nos maladies
agricoles, est donc le SIALY, le Salon international de l’agro-industrie qui
vient de se tenir à Yaoundé. Allez savoir en quoi cela a concerné l’agriculteur
de NJOMBE ou de ses environs…
C’est vrai que le Cameroun reste un pays
essentiellement agricole, qui compte 60% de population rurale. Pourtant elle
reste regrettablement illisible, la stratégie nationale de développement du
Cameroun par la filière agricole. Avec un Ministère dont le budget est sans
cesse en augmentation, doté de nombreux programmes et projets agropastoraux qui
engloutissent chaque année des centaines de milliards de francs générés soit
par des partenariats étrangers, soit par la remise de la dette. En revanche, de
faramineuses sommes continuent à être dépensées chaque année pour importer des
denrées de première nécessité tandis que les pénuries s’aggravent. Toutes
choses qui remettent à chaque fois au goût du jour, la question du bilan des
mesures prises après les émeutes de la faim de 2008. Avis à ceux qui veulent
travailler dans la paix !
La vérité est que les discours soporifiques sur
la politique agricole, la démultiplication des programmes, festivals, salons et
autres projet, traduisent hélas l’incompétence, l’inertie, la corruption des
personnes en charge d’un secteur névralgique de notre avenir commun. Nul besoin
donc d’aller importuner le pauvre travailleur de NJOMBE qui ne demande qu’à
voir son bassin de production désenclavé pour pouvoir écouler tranquillement
ses produits.
Quant à ceux qui s’intéressent à la fête du
chômage, que dis-je ? Du travail, comme disent les ivoiriens
enjaillez-vous bien car demain vous attend, intact !
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