Internet je t’aime, moi non plus !
On ne le dira jamais assez ici et là-bas, la concurrence
délivre du joug monopolistique et libère les énergies. L’arrivée d’un troisième
opérateur de téléphonie a déclenché une violente concurrence autour d’une
affaire qui en réalité pour l’heure, reste vague dans l’esprit de beaucoup de
camerounais : Il s’agit de la 3G.
Evidemment, loin de moi la prétention d’expliciter ici techniquement à
quoi ça renvoi, mais nous savons tous qu’il s’agit d’internet. Notamment
d’amélioration dans le transfert de données qui elles-mêmes, s’évaluent en
octets, kilooctets, mégaoctets et autres termes rébarbatifs pour beaucoup d’entre
nous. Bref, ce qui fait la différence
quand on passe de la 2G à la 3G ou de la 3G à la 4G, c’est la rapidité avec
laquelle on peut effectuer des opérations de transfert de données. La presse en
parle tellement, qu’on en vient à oublier
que le taux de pénétration d’internet au Cameroun est de 8% seulement environ,
soit l’un des plus bas d’Afrique. En termes clairs, deux millions de
camerounais seulement sur 25 millions ont accès à internet. Du coup, seuls la
frange marginale qui y va, renseigne la grande
majorité sur ce qui y est dit. Issa TCHIROMA BAKARY, Ministre de la
communication fait ainsi partie de ceux
qui assurent une veille cybernétique rigoureuse. Il le fait si bien que grâce à
l’une de ses sorties remarquées récemment, beaucoup d’entre nous entendaient
parler pour la première fois du journal
lemonde.fr, et que ce journal en ligne dont la lecture du contenu est
d’ailleurs payante, avait écrit que le
couple présidentiel camerounais tant adulé lors de ses rares apparitions, très
mal en point, avait voyagé précipitamment
pour aller se faire soigner, et ce avec des contre-vérités et des confusions
étonnantes. Plus de peur que de mal, le MINCOM nous a alors rassuré que l’état de santé
du couple président n’avait rien, et je le cite, « de préoccupant ».
Qui pourrait en douter ?
Nul doute donc que, le très
vigilant porte-parole du Gouvernement, ne tardera pas à convoquer la presse pour livrer au peuple camerounais auquel il voue une
indicible sollicitude, ses commentaires, correctifs et mises en garde en
rapport avec le contenu des dernières publications de ce journal dans l’article
intitulé « Boko haram met en lumière les fragilités du Cameroun ».
Selon toute vraisemblance, galvanisé par l’amusante
surenchère politique qu’il a causée au Cameroun, suite à ses révélations sur la
santé du couple présidentiel, ce journal français porterait à nouveau
l’estocade en évoquant quatre sujets : la marche patriotique du 28 février
dernier, l’âge avancé et je cite « le régime vieillissant de Paul BIYA »,
les exactions de l’armée camerounaise dans la lutte contre BOKO HARAM et la loi
anti-terroriste dont la polémique ayant entouré son entrée en vigueur est
encore vivace dans nos esprits.
Si vous en avez convenance chers auditeurs, revisitons
ensemble brièvement, ces points inscrits à coup sûr, à l’ordre du jour de l’immanquable
sortie de notre MINCOM, comment pourrait-il s’en priver ?
D’abord, la marche patriotique. Une fois qu’on aura demandé à
ce journal : de quoi je me mêle ? Pourra-t-on sérieusement lui faire
le reproche de faire l’écho d’un événement qui a alimenté une interminable
controverse chez nous ? Qu’y-a-t-il d’étrange à relever la curieuse
coïncidence entre la date de cette marche et celle des malheureux événements de
2008 ? Surtout que ceux qui connaissent l’histoire qui se cache derrière
le 11 février fête de la jeunesse peuvent toujours s’avancer à répondre…
Si d’aventure ce journal relaie qu’au Cameroun il est devenu
difficile de construire un consensus autour de la patrie, qu’aura-t-il
inventé ? Car en effet de quelle patrie peut-on véritablement parler quand
certains meurent dans les hôpitaux faute d’argent, quand les enfants des uns ne
peuvent accéder aux grandes écoles fautes de pistons et j’en passe... D’où
verrait-on d’un mauvais œil qu’un journal étranger partage l’indignation de
nombreux camerounais devant la regrettable récupération politique par quelques
Ministres, d’une marche réputée neutre ?
Quant à l’allusion faite à
l’âge avancé du Président et à son régime vieillissant, viole-t-elle un
tabou. Peut-être, sauf que là-bas en France ces questions sont devenues banales. De plus on peut se
permettre de douter que ce Journal nous apprenne grand-chose : Qui est
ignorant de ce que en 2011 à l’âge de 78 ans Paul BIYA a remporté 78% de
suffrages après 29 ans de règne face à 22 concurrents, lui qui en avait 16 en face en 2004, 7 en 1997 et 6
en 1992, tellement il est fort au fil des mandats… Alors serait-ce un sacrilège
de rappeler que 70% de cette victorieuse équipe a dépassé depuis longtemps
l’âge de la retraite et que la maladie à ce stade de la vie n’est pas
surprise ?
Sur la loi anti-terroriste, difficile de convaincre qui que
ce soit que l’ombre de la mode révolution populaire ne hantait pas les nuits de
ses rédacteurs. Les laborieuses explications sur la nécessité d’internalisation
sur le tard, d’une prescription onusienne sur fond de soupçons de collusions
internes avec la secte terroriste, sonnant tellement faux, que même un nouveau-né
voyait transpirer l’anguille sous roche.
Quid enfin des regrettables révélations sur une scabreuse
affaire de prisonniers de BOKO HARAM dont la communication au grand public
aurait dû être commandée par l’enthousiaste mobilisation populaire derrière son
armée, plutôt que la réplique à un rapport incendiaire d’une ONG qui elle,
veille par vocation au respect du droit humanitaire, en dépit de la légitimité
des conflits.
En tout état de cause, internet n’aura pas attendu le
monde.fr pour s’intéresser à notre Président. Le site Slateafrique.com ne
faisait-il pas figurer il ya un an seulement Paul BIYA au troisième rang d’un
top ten de Chefs d’Etats africains je cite, « les plus accro au
pouvoir » (allez savoir ce que ça veut dire) derrière Obiang Nguema
mbasogo, edouardo dos santos et devant yoweri moseveni et tenez-vous
tranquille, Robert Mugabe.
Le contenu de ce site qui manifestement n’est pas celui d’un
média français de renom, n’a pas retenu l’attention du porte-parole du
gouvernement, pas plus que d’autres publications peu élogieuses qui inondent le
net concernant le Président BIYA. Du coup on croit mieux comprendre ce qui se
joue. La douloureuse mise en scène d’une vieille amitié qui se désagrège non pas entre deux nations qui seraient la
France et le Cameroun, de grâce laissons ces deux peuples hors de tous ça, mais
celle entre un groupe de personnes et un autre groupe de personnes qui essaient
chacun avec ses médias de porter le coup fatal de la rupture.
La
fin est-elle aux portes ou alors ça ne fait que commencer? Just wait and see